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Leadership de la Transformation: D’un leadership visionnaire à un leadership de Co-Création

J’étais à Rome l’autre jour pour animer une formation au leadership pour le gouvernement général d’une congrégation religieuse – l’équivalent, dans le monde religieux, d’un PDG et de son équipe de direction.

Leur demande s’inscrivait dans une intention plus large : conduire la transformation de leur organisation, composée de quelque 6000 prêtres en mission sur les 5 continents, vivant dans plusieurs centaines de communautés (l’unité organisationnelle de base) réparties dans quelque 70 pays.

 

 

Deux questions clés structuraient leur intention :

 

  1. Comment impliquer l’ensemble de l’organisation dans cette transformation ?
  2. Comment cette transformation peut-elle être plus qu’une restructuration, c’est-à-dire plus qu’une simple fermeture de certaines réalités existantes, une fusion de provinces (l’équivalent d’unités géographiques de gestion), ou une « simple » réaffectation de ressources humaines et financières ?

 

 

Pour les aider, je leur ai d’abord présenté brièvement la Théorie U d’Otto Scharmer, et en particulier l’utilisation moins connue de la figure U, celle qui suggère que pour aller au-delà de la restructuration et de la réingénierie des processus, il faut s’engager dans la transformation des modèles mentaux, c’est-à-dire la manière dont, consciemment mais plus souvent inconsciemment, nous construisons dans notre esprit notre réalité organisationnelle : la raison d’être de l’organisation, les différents rôles, et les relations et processus clés qui permettent à l’organisation de fonctionner.

 

Comme le montre le schéma, ce n’est que lorsque nous avons rendu explicites nos modèles mentaux actuels et que nous les avons reliés à notre propre intention (quelle est la nouveauté que nous voulons générer ?) que nous pouvons développer de nouveaux modèles mentaux, qui conduiront à de nouveaux processus et structures pour l’organisation.

Les trois phases de l’autre utilisation, mieux connue, du modèle U s’appliqueraient toujours : pour s’engager dans la transformation, l’organisation devra Sentir la réalité émergente (à la fois interne et externe), imaginer une nouvelle façon de s’y engager (Présence), puis s’engager à la Réaliser.

 

Si ces deux cadres en U ont été utiles pour situer le niveau auquel la transformation devrait se produire et les phases clés du processus susceptibles de la générer, une question centrale restait posée : quel type de leadership leur était demandé pour réaliser leur intention ?

 

Pour répondre à cette question, je leur ai présenté la matrice de leadership que j’ai élaborée en tant que consultant auprès de nombreuses organisations dans le cadre de leurs transformations organisationnelles.

Cette matrice est structurée par 2 axes :

 

 

 

D’après mon expérience, la plupart des organisations s’engagent encore dans le changement par le biais du leadership traditionnel. Ils confient à une petite partie de l’organisation (le PDG, une équipe de direction ou une équipe de projet spécial) le soin de réfléchir à ce qui ne fonctionne pas dans le mode de fonctionnement actuel, puis de proposer des solutions. L’hypothèse est ici qu’un petit groupe de personnes intelligentes qui prend le temps d’examiner réellement la situation comprendra ce qui ne fonctionne pas et saura comment y remédier.

Malheureusement, le Leadership Traditionnel a montré à maintes reprises qu’il ne fonctionne pas ! Voici quelques raisons à cela :

 

Compte tenu des lacunes du Leadership Traditionnel, certaines organisations ont essayé différentes approches.

Parmi celles-ci, le Leadership Participatif a montré quelques caractéristiques prometteuses, principalement en impliquant une partie beaucoup plus importante de l’organisation dans l’exploration des changements qui pourraient être nécessaires. Au fur et à mesure que les personnes sont consultées, leur connaissance des questions en jeu et des solutions proposées augmente, ce qui nourrit ensuite un plus grand sentiment et un plus grand désir d’engagement.

Cependant, le Leadership Participatif est également problématique :

 

 

Une autre façon d’éviter les pièges du Leadership Traditionnel est de s’engager dans un Leadership Visionnaire. Dans cette approche, l’accent est clairement mis sur l’avenir : quel est le futur que nous sommes susceptibles de rencontrer ? Quel est notre niveau actuel de ressources, et notre mode de fonctionnement, et pouvons-nous, tels que nous sommes, réellement embrasser l’avenir ou devons-nous évoluer ? Nos produits, ou notre mission, sont-ils adaptés à ce Futur émergent ? Sont-ils ce dont ce à quoi ce Futur nous appelle ?

Au XXIe siècle, ce sont des questions de leadership que chaque organisation doit se poser et explorer en vérité : en regardant ce qui est, et non pas seulement ce que nous souhaitons voir.

 

Ainsi, un Leader Visionnaire, ou une équipe de Leadership Visionnaire, va clairement dans la bonne direction : regarder l’avenir, et essayer de préparer l’organisation à celui-ci.

Toutefois, le Leadership Visionnaire présente également des lacunes importantes :

 

 

Le quatrième type de leadership dans cette matrice est celui qui, en ce début de XXIe siècle, présente le plus de potentiel pour les organisations. En effet, le Leadership de la Co-Création s’appuie sur les deux paramètres clés :

 

 

Si le Leadership de Co-Création réussit à apporter une transformation qui a du sens pour toutes les parties impliquées, et pas seulement pour certaines parties de l’organisation, il n’équivaut pas à une sorte de processus démocratique élargi, basé sur un référendum. Elle n’exige pas non plus la dissolution des rôles traditionnels d’autorité et de prise de décision. Au contraire, les rôles existants sont très souvent cruciaux pour le succès d’un processus de transformation de la co-création ; ce qui est transformé, cependant, ce n’est pas le rôle, mais la manière dont il est pris ; pas le rôle lui-même, mais la représentation mentale portée jusqu’à présent dans la psyché de l’organisation de ce qu’est le rôle. Par exemple :

 

 

Une fois que j’eus présenté cette matrice au Gouvernement Général de cette congrégation, ils ont pu nommer le type de processus, et de leadership, dans lequel ils voulaient s’engager : La Co-Création.

 

Tout ce que nous avions à faire alors était d’examiner plus en détail comment ils pouvaient mettre cela en œuvre …

 

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